Le Magazine de l’Association des Alumni HEC Lausanne

02.06.2022
Dossier spécial 95 > Toutes les éditions

A diplôme identique, c’est votre savoir-être qui fera la différence pour votre employeur !

Les qualités pour les métiers de demain sont-elles si différentes de celles d’aujourd’hui ?

Ouverture vs Certitude, Quotient intellectuel vs Quotient émotionnel, Agilité vs Hiérarchie que faut-il privilégier pour garantir votre employabilité ?

Interview de Christophe Andreae

Quels types de profils recherchent les entreprises aujourd’hui ?

En dehors des caractéristiques propres à chaque métier, les recruteurs vont s’intéresser à la culture digitale du candidat ou de la candidate, à ses compétences relationnelles et tout ce qui pourrait développer la création de valeur pour l’entreprise.

Quasiment ¾ des métiers sont liés à des services à la clientèle, pour lesquels on attend que les collaborateurs soient prêts à apprendre, car les composantes du métier de base vont changer dans le futur.

Ce que l’on va privilégier c’est, avant tout, une agilité humaine, intellectuelle.

Il s’agit dès lors de composer la meilleure des recettes avec les ingrédients Savoir, Savoir-faire et Savoir-être tout en se projetant dans un avenir.

Les enseignements universitaires se sont concentrés sur des cursus d’apprentissage très pointus, les « hard skills »

Les enseignements universitaires se sont concentrés sur des cursus d’apprentissage très pointus, les « hard skills ». Est-ce qu’ils se seraient trompés concernant l’employabilité des étudiant-e-s ?

Les compétences métiers sont indispensables et c’est un socle sur lequel les compétences personnelles « Soft Skills » vont faire la différence entre 2 candidat-e-s ayant le même diplôme.

On pourra toujours acquérir des connaissances complémentaires, si nécessaire, en revanche les qualités d’écoute, d’empathie ou d’agilité intellectuelle ne s’apprennent pas en suivant un séminaire professionnel de quelques jours.

Même dans un environnement très technique, ces compétences « humaines » viendront renforcer la capacité d’adaptation à la complexité technologique et aux changements à venir.

Pendant de nombreuses années, on s’est attaché à la force du raisonnement, à des compétences mathématiques renforcées plutôt que sur la personnalité de nos collaborateur-trice-s.

On a souvent présenté le  cerveau gauche  comme associé au raisonnement logique et rationnel, le  cerveau droit étant plutôt intuitif et émotionnel. Il y aurait ainsi des personnalités plutôt « cerveau gauche » ou « cerveau droit », qui utiliseraient plus un côté du cerveau que l'autre. Cette conception attribue même plus souvent le cerveau gauche aux hommes et le droit aux femmes, connues pour être plus intuitives... De même, les artistes, plus portés sur la création, utiliseraient davantage leur cerveau droit ! Même si cela ne s’appuie pas sur des connaissances scientifiques avérées : Nous utilisons bien nos deux hémisphères cérébraux, quelle que soit notre personnalité.

Est-ce que les recruteurs vont abandonner la lecture des CV’s pour des tests psychologiques ?

Il y a de plus en plus de traitement des postulations à travers des plateformes où les algorithmes d’Intelligence artificielle sélectionnent automatiquement les profils les plus « conformes en termes de compétences métiers ». Ce qui va être recherché ce sont des compétences « humaines », des capacités d’adaptation au changement au- dessus de la moyenne.

Le recrutement, la formation des collaborateurs sont des activités couteuses en temps et en énergie et on souhaite ne pas perdre ces personnes.

Ce qu’une personne connaît aujourd’hui est valable 5 à 7 ans et il faut donc s’intéresser au monde autour de nous et pas seulement à l’entourage professionnel et être prêt-e aux changements.

Soft skills, Agilité, Quotient Emotionnel vs Quotient Intellectuel, quelles sont les nouvelles compétences pour garantir son employabilité ?

C’est surtout la capacité d’adaptation, la remise en question permanente pour trouver les bonnes solutions qui feront la différence. Ce qui est juste aujourd’hui peut être faux demain. Il faut faire converger agilité, compétences intellectuelles et émotionnelles, passer de la certitude à l’ouverture. Les métiers de demain n’existent pas encore et c’est à une formation permanente que nous devons nous ouvrir afin de lutter contre une obsolescence de nos compétences techniques. Cette obsolescence n’existe pas dans nos compétences humaines et elle se renforce même avec l’âge et l’expérience.

Les techniques d’apprentissage changent aussi, des programmes comme l’École 42, des gestes trop précis peuvent être remplacés par les robots, l’intelligence artificielle et c’est donc nos compétences HUMAINES qui feront la différence.

Les nouvelles générations ont une approche du travail fondamentalement différente.

On dit que les nouvelles générations ont une approche du travail fondamentalement différente de leurs ainé-e-s. Est-ce que vous constatez cela ?

Les nouveaux entrants sur le marché du travail ont des attentes différentes, la quête du sens est plus forte. Ils recherchent autre chose que simplement le salaire. 

Monter dans la hiérarchie, placer le travail au centre des préoccupations n’est plus un but. 

Ils placent la qualité de vie, le temps personnel, un temps partiel à 80%, aussi recherché par les hommes, pour être papa ou s’adonner à une passion comme facteur clé d’épanouissement personnel. Ce phénomène a été accéléré par le télétravail et le retour au bureau à temps complet n’est plus souhaité. Une présence de 2 jours par semaine semble répondre le plus aux aspirations de cette tranche d’âge et à un équilibre vie professionnelle/vie privée plus marqué et à des horaires de travail plus souples, finir à 17h ou à 20h, selon ce que l’on souhaite faire de sa journée.

Les entreprises vont devoir répondre à cette nouvelle donne si elles veulent attirer et conserver les profils de ces jeunes générations, plus conscientes, plus égalitaires, et qui ont une plus grande confiance, indépendamment de leur sexe, pour postuler à des positions de management, même à temps partiel qu’attendre une promotion automatique.

Néanmoins, le marché du travail est atteint de « jeunisme » et les plus de 50-60 ans ont plus de difficultés à se repositionner, malgré des qualités émotionnelles qui sont plus essentielles que les techniques ! Ici le réseau reste un atout majeur.

Un monde professionnel plus co-créatif et diversifié est bien la solution d’avenir en termes d’employabilité !

Interview réalisé par Nadine Reichenthal